L’écrivain Kamel Daoud visé par 2 mandats d’arrêt internationaux émis par l’Algérie !

Kamel Daoud, Prix Goncourt 2024, est visé par deux mandats d’arrêt internationaux émis par l’Algérie.

Publié : 7 mai 2025 à 15h43 par La rédaction

Kamel Daoud
Crédit : Kamel Daoud - X

L’écrivain franco-algérien Kamel Daoud, récemment couronné du prix Goncourt 2024 pour son roman Houris (Gallimard), fait l’objet de deux mandats d’arrêt internationaux délivrés par la justice algérienne. L’information a été confirmée mardi 6 mai par son avocate Jacqueline Laffont auprès de l’Agence Radio France.

Deux mandats, des motifs jugés politiques

Selon Me Laffont, son client a été informé sans détail précis de l’existence de ces mandats : le premier aurait été émis en mars, le second au début du mois de mai. « Les motivations de tels mandats algériens ne pourraient qu’être politiques », déclare-t-elle, estimant qu’il s’agit là d’une tentative pour « réduire au silence un écrivain » qui dérange par son œuvre. Une procédure est déjà en cours devant la commission de contrôle des fichiers d’Interpol, afin de bloquer toute diffusion éventuelle des mandats via le système international.

Un roman sous tension

Depuis sa parution en août 2024, Houris est au cœur de multiples controverses. Le livre, qui évoque les massacres de la décennie noire en Algérie, a été interdit dans le pays. Son auteure principale, l’héroïne fictive Aube, est accusée d’être inspirée directement du vécu d’une survivante de cette époque tragique, Saâda Arbane. Cette dernière reproche à l’auteur d’avoir utilisé son histoire sans autorisation, violant selon elle à la fois sa vie privée et le secret médical.

Poursuites croisées en Algérie et en France

Deux plaintes ont été déposées en Algérie. La première, le 18 novembre 2024, pour atteinte à la vie privée. La seconde vise des propos tenus dans une interview au Figaro, où Kamel Daoud évoquait « un déséquilibre judiciaire entre la France et l’Algérie » et dénonçait une manœuvre orchestrée par les autorités algériennes pour le faire taire. En France, des poursuites sont également en cours contre lui et son éditeur, Gallimard, à l’initiative de la même plaignante.

Une affaire politique selon la défense

L’avocate de Kamel Daoud n’a aucun doute : il s’agit d’un « bras de fer symbolique ». Le climat de tensions diplomatiques entre la France et l’Algérie, combiné à la sensibilité des sujets abordés dans Houris, expliquerait la virulence des poursuites. « Pendant la guerre civile des années 1990, on assassinait des écrivains. Aujourd’hui, on les emprisonne et on lance des mandats d’arrêt contre eux », déclare Kamel Daoud, dans une réaction transmise par son entourage.

Une campagne médiatique ciblée

La plaignante, représentée par l’avocate Fatma Zohra Benbraham, a multiplié les interventions médiatiques depuis plusieurs mois. Lors d’une interview sur une radio algérienne en décembre 2024, elle a affirmé que le roman avait été commandé par Emmanuel Macron et que ce dernier aurait même exercé des pressions pour l’attribution du prix Goncourt à Kamel Daoud, « dans le but de nuire à l’Algérie ». Des accusations qualifiées de « délirantes » par des proches de l’écrivain, qui y voient une tentative de discrédit politique.

Jamais dans l’histoire du prestigieux prix littéraire, créé en 1892, un lauréat n’avait été visé par des mandats d’arrêt pour l’œuvre même qui lui a valu cette distinction.