Rétention administrative : un enfermement de plus en plus massif, au mépris des droits fondamentaux !

Alors que les parlementaires examinent de nouveaux textes pour renforcer le caractère répressif de la rétention administrative, cinq grandes associations tirent la sonnette d’alarme. Dans leur rapport annuel, elles dénoncent une logique d’enfermement disproportionnée et des atteintes répétées aux droits des personnes étrangères.

Publié : 2 mai 2025 à 11h48 par La rédaction

Centre de rétention administrative
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Quarante ans après la création du premier centre de rétention administrative (CRA), la France enferme plus que jamais. En 2024, plus de 40 000 personnes ont été retenues dans l’Hexagone et en Outre-mer. Pourtant, l’outil reste peu efficace : le taux d’éloignement depuis les CRA ne dépasse pas 39%, contre 36% en 2023. Malgré cette faible performance, l’enfermement se généralise, souvent sans perspective réelle de renvoi.

La durée moyenne de rétention atteint désormais 33 jours, un record. Dans certains centres comme celui de Lyon-Saint-Exupéry 2, elle dépasse les 40 jours. Un enfermement qui, selon les associations, « n’est pas seulement inutile, il est souvent illégal ».

Des lois de plus en plus dures, des situations individuelles ignorées

La loi du 26 janvier 2024, dite « asile et immigration », marque un tournant. Elle supprime des protections fondamentales, notamment pour les personnes malades ou ayant des attaches familiales en France. Surtout, elle fait de la « menace pour l’ordre public » un critère central pour placer en rétention, une notion jugée « floue et discrétionnaire » par les associations.

Le rapport dénonce des décisions d’enfermement « stéréotypées », « prises sans prendre en compte la réalité des parcours de vie ». Ainsi, beaucoup sont enfermés alors qu’ils vivent en France depuis des années, ont un travail, une famille. Une logique qui s’apparente, selon les auteurs du rapport, à une « politique de stigmatisation ».

Des conditions de rétention qui se dégradent

Le rapport évoque des cas de personnes vulnérables, malades ou en détresse psychique, maintenues malgré tout. Trois personnes sont mortes en CRA en 2024, une autre à l’hôpital peu après sa libération.

Les conditions d’enfermement sont également pointées du doigt. Manque de personnel, tensions croissantes, gestes désespérés, automutilations, tentatives de suicide… Le tableau est sombre. À Mayotte, où les placements sont les plus nombreux, les expulsions se font souvent avant toute intervention d’un juge. Des enfants y sont toujours enfermés, malgré les condamnations européennes.

La menace sur l’accès aux droits

Les associations – La Cimade, Forum réfugiés, France terre d’asile, Groupe SOS Solidarités-Assfam et Solidarité Mayotte – dénoncent également une tentative de mise à l’écart de la société civile. Un projet de loi prévoit de confier à l’OFII, organisme rattaché au ministère de l’Intérieur, l’assistance juridique en CRA. Pour les associations, ce serait « un coup grave à l’accès aux droits, à la transparence démocratique et au rôle de contre-pouvoir de la société civile ».

Elles alertent : « Maintenir une assistance juridique indépendante en CRA, ce n’est pas défendre un intérêt sectoriel. C’est défendre l’État de droit, la transparence et la dignité dans un domaine où ils sont trop souvent mis à mal. »

Appel solennel aux parlementaires

À l’heure où le gouvernement prévoit d’étendre encore les capacités d’enfermement et de porter la durée maximale de rétention à 210 jours, les associations demandent un changement de cap. Elles exhortent les élus à « ne pas franchir une ligne rouge », celle du respect des principes fondamentaux de la démocratie.

« Nous appelons nos élus à mettre un terme à ces politiques migratoires stigmatisantes et répressives, et à assurer le respect scrupuleux des cadres légaux et des droits fondamentaux des personnes étrangères », conclut le communiqué.