Le tribunal administratif de Lille rétablit le contrat d’association entre le lycée musulman Averroès et l’État !

La justice annule la rupture du contrat décidée en 2023 par la préfecture du Nord, faute de preuves suffisantes de manquements graves.

Publié : 25 avril 2025 à 10h19 par La rédaction

Lycée Averroès
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C’est un verdict attendu qui vient clore, au moins provisoirement, un long contentieux entre l’État et le lycée musulman Averroès de Lille. Ce mercredi 23 avril, le tribunal administratif de Lille a annulé la décision de résiliation du contrat d’association qui liait l’établissement scolaire à l’État, actée fin 2023 par l’ancien préfet du Nord. Celui-ci évoquait alors des « manquements graves aux principes fondamentaux de la République ».

La justice invalide la décision du préfet

Saisie par l’établissement, la juridiction administrative a jugé que la décision préfectorale du 7 décembre 2023 ne reposait pas sur des éléments suffisamment probants. Dans son communiqué, le tribunal estime que « la condition tenant à l’existence de manquements graves au droit n’était pas remplie », et que la procédure ayant conduit à cette résiliation comportait plusieurs irrégularités.

Cette décision fait suite à deux suspensions prononcées en référé plus tôt dans l’année, mais il s’agit ici du premier jugement sur le fond du dossier. Le rapporteur public, qui avait recommandé en mars dernier le rétablissement du contrat, avait déjà contesté l’essentiel des reproches formulés par l’administration.

Des accusations insuffisamment étayées

Les griefs portés contre le lycée par la préfecture reposaient notamment sur le contenu de certains enseignements jugés contraires aux valeurs de la République, ainsi que sur le manque de pluralisme supposé dans les ouvrages mis à disposition des élèves. D’autres soupçons concernaient des modalités de financement jugées opaques.

Le tribunal a toutefois considéré que l’État n’avait pas apporté les preuves nécessaires pour étayer ces accusations. Par exemple, aucun document n’a permis de démontrer de manière claire que les ressources pédagogiques utilisées dans l’établissement contrevenaient aux principes républicains. Il a également été reproché à la préfecture de ne pas avoir informé suffisamment en amont l’association de certains éléments à charge, l’empêchant ainsi de préparer une défense adéquate.

Une victoire pour Averroès

Le lycée Averroès, principal établissement musulman sous contrat en France, a immédiatement réagi à cette décision. Dans un communiqué, l’association gestionnaire s’est félicitée d’un jugement qui « rétablit l’honneur du groupe scolaire » et a salué « le travail minutieux de la justice, loin des polémiques politiciennes de diversion ». La direction évoque également un « véritable acharnement » dont elle se dit victime depuis plusieurs années.

L’établissement, connu pour l’excellence de ses résultats scolaires, avait vu ses effectifs chuter de 470 à 290 élèves après la suspension du contrat. Pour compenser la perte de subventions, le lycée avait dû doubler ses frais de scolarité et organiser une collecte de fonds en ligne pour assurer sa survie.

Un rétablissement rétroactif du contrat

Selon l’interprétation du jugement par l’association, le contrat d’association est rétabli de manière rétroactive. Le tribunal a indiqué que cette annulation implique le retour du lycée Averroès dans le giron de l’enseignement public, même si la mise en œuvre concrète de cette décision reste à la charge de l’administration.

Parmi les vices de procédure soulignés, la justice a notamment pointé les conditions dans lesquelles s’est tenue la commission de concertation ayant conduit à la résiliation, ainsi que l’absence de communication en temps utile de certaines pièces du dossier, comme le rapport sur le centre de documentation du lycée.

Une décision symbolique

Ce jugement revêt une portée symbolique forte, dans un contexte où les questions liées à la laïcité et à l’enseignement confessionnel sont au cœur de débats récurrents. Il souligne aussi l’importance du respect des règles de procédure dans la gestion des relations entre l’État et les établissements sous contrat.