Loi immigration : le Conseil constitutionnel censure 35 articles !

29 janvier 2024 à 10h34 par La rédaction

La décision tant attendue du Conseil constitutionnel sur la loi immigration, rendue jeudi 25 janvier, marque un tournant majeur. Avec 35 articles sur 86 censurés, la loi votée en décembre dernier ne ressemble plus à sa version originale.

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Crédit : Facebook Conseil constitutionnel

Cette révision, saluée par certains et déplorée par d'autres, modifie profondément le paysage législatif français en matière d'immigration.

Un texte profondément remanié

Le Conseil, saisi par le Président Emmanuel Macron, la présidente de l'Assemblée nationale et des parlementaires de gauche, a dû examiner près de cinquante articles d'un texte controversé.

La droite en sort perdante, tandis que la majorité semble trouver son compte dans cette décision. Les 35 articles censurés, dont 32 jugés hors sujet, portent un coup dur à des mesures emblématiques du projet initial. 

Quelles sont les mesures clés censurées ?

La censure a frappé fort, particulièrement sur des points sensibles. Parmi eux, le durcissement de l'accès aux aides sociales pour les non-Européens, la modification du regroupement familial, l'instauration de quotas migratoires par le Parlement, ou encore la controversée « caution retour » pour les étudiants étrangers.

Ces décisions marquent une victoire pour les opposants à un durcissement de la politique d'immigration. 

Les cinq ans de résidence pour les prestations sociales abolis

Un point particulièrement scruté était l'accès aux prestations sociales. La mesure exigeant cinq ans de résidence pour y prétendre a été jugée inconstitutionnelle.

Le Conseil réaffirme ici son rôle de garant de l'égalité des citoyens devant la loi, sans distinction d'origine, de religion ou de race. 

Autres dispositions écartées 

Outre les mesures phares, d'autres, considérées comme des « cavaliers législatifs », ont été rejetées. Elles incluaient des conditions linguistiques pour le regroupement familial et des critères de stabilité des relations.

Un tournant pour les étrangers protégés

L'article 37, désormais validé, élargit le champ d'application des OQTF (Obligations de Quitter le Territoire Français) à des catégories d'étrangers auparavant protégées, notamment ceux arrivés en France avant 13 ans. Le Conseil constitutionnel estime que les garanties existantes sont suffisantes, affirmant que « le socle institutionnel n'est pas atteint ».

Restriction de l'Aide Sociale pour certains étrangers

Selon l'article 44, les jeunes étrangers de 18 à 21 ans sous le coup d'une OQTF se verront désormais privés de l'assistance de l'Aide Sociale à l'Enfance (ASE), une rupture avec la pratique actuelle.

Création d'un fichier pour mineurs non accompagnés

L'article 39 introduit un fichier pour les mineurs non accompagnés suspectés de délits, incluant leurs empreintes digitales et photographies, sans consentement nécessaire. Le Conseil a validé cette mesure, la considérant en lien avec les objectifs initiaux du projet.

Régularisation conditionnelle dans les métiers en tension

La loi maintient la régularisation des travailleurs sans papiers dans les métiers en tension, bien que dans une forme plus restrictive que prévue initialement. Les préfets disposent d'un pouvoir discrétionnaire dans ce processus, permettant aux étrangers de demander un titre de séjour indépendamment de leur employeur.

Engagement au respect des principes de la République

L'article 46 instaure un contrat d'engagement au respect des principes républicains pour toute personne étrangère sollicitant un titre de séjour. 

Allongement de l'assignation à résidence

L'article 42 prolonge la durée maximale d'assignation à résidence de certains étrangers de six mois à un an, renouvelable deux fois. Cette mesure concerne les individus ne pouvant quitter le territoire français.

Développement des espaces « France Asile »

Enfin, l'article 62 prévoit la création des espaces « France Asile » sur tout le territoire, rassemblant divers services pour traiter les demandes d'asile de façon plus efficace et centralisée.

Réactions et conséquences 

La droite et l'extrême droite ont dénoncé la censure, tandis que la majorité y a vu une victoire. Gérald Darmanin, intervenant sur TF1, a annoncé que la loi serait promulguée par Emmanuel Macron « très bientôt ». Il a également prévu de réunir les préfets pour mettre en œuvre les instructions nécessaires à l'application de la loi.

Le président du Conseil constitutionnel réagit ! 

Laurent Fabius a précisé sur France Inter que le Conseil constitutionnel n'est pas un organe de service politique, mais une institution rendant des décisions juridiques. Ses propos faisaient écho aux critiques de Laurent Wauquiez de LR, qui avait parlé d'un « coup d'État de droit ».