Hausse des taxes pour les étrangers : vers un droit au séjour réservé aux plus riches ?

À partir de janvier 2026, les étrangers, dont les ressortissants maghrébins, devront débourser beaucoup plus pour obtenir un titre de séjour, un visa long séjour ou la nationalité française. Derrière cette décision budgétaire du gouvernement se joue un débat de fond sur l’égalité d’accès aux droits et la politique migratoire de la France.

Publié : 28 octobre 2025 à 13h28 par La Rédaction

Carte de séjour
Crédit : DR

Des hausses qui frappent fort ! Le projet de loi de finances 2026, et plus précisément son article 30, prévoit une augmentation marquée des taxes et droits de timbre liés à l’immigration. Selon La Voix du Nord, qui a révélé ces chiffres le 27 octobre, cette hausse toucherait directement les titres de séjour, les visas de long séjour et les démarches de naturalisation. Concrètement, l’obtention ou le renouvellement d’un titre de séjour passerait de 200 à 300 euros, soit une hausse de 50 %.

Le même tarif s’appliquerait aux visas de long séjour équivalant à un titre de séjour. Pour certains publics – étudiants, jeunes au pair, chercheurs ou bénéficiaires d’une protection humanitaire –, le coût serait ramené à 100 euros, tandis que les premières délivrances pour des personnes vulnérables resteraient gratuites.

Le droit de timbre grimperait, lui, de 25 à 50 euros, et certaines démarches administratives atteindraient 255 euros de timbre fiscal, à régler exclusivement en ligne. La naturalisation deviendrait également plus coûteuse : 300 euros au lieu de 200, dont 100 non remboursables en cas de refus du dossier. En tout, une demande de naturalisation représenterait 555 euros contre 255 actuellement.

Selon le gouvernement, ces hausses viseraient à « rapprocher la France de la moyenne européenne » et devraient générer 160 millions d’euros de recettes supplémentaires.

La colère des associations

Pour les associations de défense des droits des étrangers, ces nouvelles taxes sont un signal inquiétant. La Cimade dénonce un dispositif qui « propose de faire payer des montants exorbitants aux personnes étrangères pour leur droit au séjour ». Le Gisti, le Syndicat des avocats de France (SAF) et plusieurs collectifs parlent même d’un « racket institutionnel »

Selon eux, le gouvernement transforme un droit fondamental en source de revenus. « Une fois de plus, le gouvernement franchit, au travers de ces dispositions, un pas supplémentaire dans sa politique de dissuasion, de précarisation et d’exclusion des personnes étrangères », dénonce encore la Cimade.

Les associations rappellent que la France figure déjà parmi les pays d’Europe où le coût du droit au séjour est le plus élevé. Elles alertent sur les conséquences humaines : des familles séparées faute de pouvoir renouveler un titre, des salariés licenciés pour absence de régularisation, des étudiants contraints d’abandonner leurs études.

Des étudiants étrangers exclus des APL

L’inquiétude ne s’arrête pas là. L’article 67 du même projet de loi prévoit la suppression des Aides personnalisées au logement (APL) pour les étudiants étrangers non européens et non boursiers. Une mesure qui, selon la Cimade, permettrait « d’exclure des APL la quasi-totalité des étudiant·es étranger·es extra-européen·nes ».

L’association y voit une « préférence nationale dans l’aide au logement » et prévient que plus de 300 000 étudiants risquent de perdre leurs droits. Une pétition rassemblant déjà 40 000 signatures circule pour dénoncer ce qu’elle considère comme une mesure discriminatoire.

Le droit au séjour, un luxe administratif

Derrière la justification budgétaire, les associations voient se dessiner une logique d’exclusion. En augmentant les taxes et en restreignant les aides, le gouvernement rend plus difficile l’accès au séjour pour les plus précaires.

Pour ces organisations, cette politique « n’encourage pas l’intégration mais nourrit la précarité et le sentiment d’exclusion ». Le droit au séjour devient un luxe administratif, et la naturalisation, un objectif inaccessible pour des milliers de personnes pourtant installées et actives en France.

Elles appellent l’État à revoir sa copie et à garantir un accès équitable aux droits fondamentaux. Comme le rappelle La Cimade, « l’obtention d’un titre de séjour ou de la nationalité française ne doit pas dépendre du revenu, mais du respect des principes d’égalité et de dignité ».