Transports, climat, pouvoir d’achat : Yann Wehrling répond aux Franciliens !

Chaleurs extrêmes, gratuité des transports, conflits entre collectivités… Le vice-président de la Région Île-de-France chargé de la transition écologique, Yann Wehrling, était l’invité de la Matinale de Beur FM ce mercredi 9 juillet. Chargé de la transition écologique, il a détaillé les défis liés au dérèglement climatique et les réponses apportées à l’échelle régionale.

Publié : 9 juillet 2025 à 13h46 par La rédaction

Yann Wehrling
Crédit : Beur FM

« Les effets du changement climatique, ce sera pour 2050. » Et en fait, c’est maintenant. Difficile de faire plus direct. Pour Yann Wehrling, ex-écologiste convaincu et aujourd’hui vice-président de la Région Île-de-France en charge du climat, l’urgence n’est plus à prouver. Face aux vagues de chaleur qui s’enchaînent, il tire la sonnette d’alarme : « On va devoir prendre du temps, et en même temps, il faut qu’on aille vite. »

Et pour cause : la région connaît désormais des canicules à répétition chaque été et des inondations hivernales plus fréquentes. Une situation qui pousse les autorités à adapter les infrastructures, mais aussi les mentalités.

Des bâtiments à repenser, des gestes à réapprendre

Face à cette accélération climatique, l’adaptation passe par des gestes simples inspirés... du Sud. « Les bâtiments sont frais parce qu’ils sont blancs. On ferme les volets le jour, on ouvre la nuit pour faire rentrer la fraîcheur. » Des réflexes encore peu ancrés en Île-de-France mais que le vice-président juge essentiels à diffuser.

En ce sens, Yann Wehrling insiste aussi sur un détail crucial souvent ignoré : « Il faut en journée mettre des volets clairs devant les fenêtres et pas derrière, sinon ça ne sert à rien. » Il va même plus loin : « Il faut peut-être même mettre des draps mouillés, comme on le fait aussi dans le sud. » Des habitudes venues d’ailleurs qu’il juge désormais essentielles à apprendre en Île-de-France.

Concernant l’usage de la climatisation, il est clair : « Dans l’immédiat, oui, bien sûr. On ne peut pas empêcher les gens d’utiliser la clim.” Mais à moyen et long terme, il prône des alternatives plus durables, tout en soulignant la nécessité d’une «transition rapide mais efficace ».

Il distingue d’ailleurs clairement la climatisation du simple rafraîchissement : « Réfrigérer, c’est une technique qui permet de baisser la température de 4, 5, 6°C par rapport à l’extérieur. » À l’inverse, « la différence de température, ce n’est pas de 4-5°C, c’est parfois 15-20°C. […] Ce n’est pas très bon pour la santé. » Une nuance qui justifie les choix techniques de la région.

Transports franciliens : climatisation partielle, objectifs clairs

Interrogé sur la souffrance des chauffeurs de bus et des usagers lors des pics de chaleur, Yann Wehrling a défendu les avancées régionales : « 60% des bus sont climatisés ou réfrigérés. […] Les trams, c’est 100%. »L’objectif affiché : 100% des métros équipés d’ici 2035.

Il admet que « tous les bus ne sont pas encore équipés », mais assure que la cadence est accélérée. Le but : rendre les trajets supportables sans créer un choc thermique dangereux pour la santé.

Quand il fait trop chaud, chaque détail compte. Des efforts qui s’accompagnent de petites innovations concrètes : « Il y a à peu près 136 fontaines à eau installées aujourd’hui dans les gares pour permettre aux gens […] de se rafraîchir. »

Mais au-delà du confort, l’enjeu est sanitaire : « Beaucoup de gens ne se rendent pas compte que quand il fait très chaud, il faut plus boire, plus s’hydrater, notamment les personnes âgées et les personnes fragiles. » C’est pour cette raison, dit-il, que l’accès à l’eau a été largement facilité dans les gares.

Des retards persistants ? « On ne peut pas garantir le 100% »

L’été 2024, pendant les Jeux olympiques, les transports avaient bien fonctionné. Depuis, certains Franciliens pointent un retour à la normale… avec ses aléas. Yann Wehrling assume : « Pendant les JO, on a mis le paquet. » Il rappelle que l’afflux massif de visiteurs avait nécessité un service renforcé et des efforts logistiques exceptionnels.

Et aujourd’hui ? « Chaque jour, ils [les opérateurs] refont des choses nouvelles pour se préparer. »

Des infrastructures fragilisées par la chaleur

Face aux chaleurs extrêmes, les infrastructures ferroviaires sont elles aussi mises à rude épreuve : Rails déformés par la chaleur, caténaires en surchauffe… « Ce sont des aléas techniques que l’on ne peut jamais garantir à 100%. […] Mais les choses sont vraiment gérées avec un grand professionnalisme. »

« Il y a des rails qui se déforment avec la chaleur », explique-t-il, « et ça, il faut l’anticiper, il faut le regarder, il faut le surveiller. » Il en va de même pour les lignes électriques : « La surchauffe peut provoquer, à un moment donné, des arrêts, des pannes, et il faut les réparer à toute vitesse. »

Voiture ou transports ? « Il ne faut pas faire la guerre »

Les tensions entre la région et la mairie de Paris sont bien réelles, notamment sur le périphérique et les politiques de mobilité. Yann Wehrling s’inscrit en faux contre une vision anti-voiture jugée parisiano-centrée : « 80% des usagers du périph’ ne sont pas des Parisiens. […] À Paris, on peut vivre sans voiture. Ce n’est pas une réalité pour la majorité des Franciliens. »

Et il le reconnaît avec honnêteté : « Moi-même, d’ailleurs, j’habite Paris, je n’ai pas de voiture, mais je n’ai pas la prétention de dire que tous les gens qui habitent en Île-de-France peuvent réellement ne pas avoir de voiture. Ma situation n’est pas exportable au-delà du périph’, en réalité. »

Il plaide pour un équilibre entre transports collectifs et usage raisonné de la voiture, notamment via le développement des parkings relais, qu’il juge « indispensables ».

Tensions avec la Mairie de Paris

Ce débat renvoie aussi à des tensions politiques plus larges, que Yann Wehrling ne cherche pas à masquer : « C’est la mairie de Paris seule qui peut décider de ce qui se passe sur le périph’, ce qui est une anomalie. » Il parle d’une gestion « assez dogmatique sur la voiture », regrettant que la ville ne cherche pas à mieux articuler ses choix avec ceux de la région.

Gratuité des transports : « Ce n’est pas la bonne réponse »

La question revient souvent chez les auditeurs : pourquoi ne pas rendre les transports gratuits en Île-de-France ? Yann Wehrling répond sans détour : « Rien n’est gratuit. » Il rappelle que « les transports en commun, c’est presque 10 milliards d’euros par an » et que « 30% de ce montant est couvert par la tarification. Le reste est financé par les collectivités locales et l’État.

S’il défend une tarification sociale ciblée, il s’oppose à une gratuité généralisée qui, selon lui, « profiterait aussi aux milliardaires et aux touristes ».

Et le pass Navigo ? Hausse en vue ?

La question fâche. Sera-t-il plus cher l’an prochain ? Prudence du vice-président : « Je ne peux pas vous répondre à cette question là, maintenant. » Il assure néanmoins que la situation est « maîtrisée » et que la Présidente du Conseil régional d'Île-de-France, Valérie Pécresse « se démène pour financer les transports à l’avenir ».

Un héritage durable après les JO ?

Enfin, un mot sur l’après-Jeux olympiques : que reste-t-il des aménagements ? Il salue un effort « écologique et durable » : « Beaucoup d’installations ont été faites pour rester. […] Le village olympique va devenir un quartier de logements. »

Malgré les tensions, les limites et les critiques, Yann Wehrling affiche une volonté assumée de concilier adaptation écologique, équité sociale et pragmatisme. « On peut toujours faire mieux. Mais aujourd’hui, je pense que ce n’est pas mal. » Une formule qui résume bien l’état d’esprit d’une région sous pression, mais en mouvement.