Slimane Azem, la voix de l’exil !

27 janvier 2022 à 21h28 par Fodil

Slimane Azem aurait fêté ses 104 ans, le 19 septembre prochain, mais la légende de la chanson algérienne s’est éteinte il y a 39 ans, le 29 janvier 1983. Retour sur des instants de la vie de celui qui était la voix des immigrés exilés et de la révolte.

Slimane Azem

Slimane Azem est né à Agouni Gueghrane dans la wilaya de Tizi Ouzou en Algérie, un petit village au pied des montagnes du Djurdjura. Rien ne prédestine cet humble fils de fermier à poursuivre une carrière musicale. Il se passionne pour les fables de La Fontaine qui influenceront toutes ses œuvres et compositions. A 11 ans, il devient employé agricole chez un colon à Staoueli à Alger.

La voix de l’exil

En 1937, il arrive à Longway, obtient un emploi d'ouvrier dans une aciérie, puis est mobilisé dans la « fausse guerre » d'Issoudun. En 1940, il arrive à Paris et est embauché comme assistant électricien dans le métro. La capitale le fascinait mais le travail y était dur, enfermé dans des tunnels et dans des métros souterrains huit heures par jour. On retrouve d’ailleurs des traces de cette période dans sa première chanson « A Moh A Moh ».

Après la libération, il reprend un café du XVe arrondissement de Paris où il joue ses premières compositions. Suite à l'attention et aux encouragements de Mohamed el Kamel, ancien membre de l'Orchestre Bachtarzi, Slimane Azem enregistre enfin son premier album avec le titre « A Moh A Moh ». Ses disques seront vendus chez Madame Sauviat, le seul disquaire qui vend des albums d'artistes maghrébins et orientaux.

En 1955, pendant la guerre d'Algérie, il compose « Effeɣ ay ajrad tamurt iw », dans lequel il assimile les colons français à des criquets qui détruisent la culture et dévorent son pays. La chanson est immédiatement interdite par un décret de la République Française émis le 22 juin 1957.

Lorsque l'Algérie obtient son indépendance en 1962, Slimane Azem critique le pouvoir  algérien dans des chansons, ce qui lui vaut une interdiction de territoire par les autorités du pays.

Contraint de s'installer en France, il est devenu une voix légendaire chantant l’exil et les kabyles ne pouvaient l’écouter que sur les radios françaises.

Les autorités algériennes censurent ses chansons

En effet, Slimane Azem était interdit d'émission en Algérie, ses disques ne circulaient qu'en secret et on ne lisait son nom qu’en minuscule que dans les briefings des quotidiens locaux.

Il a fallu attendre 1988 pour enfin entendre Azem dans l'émission « Timlilit n tmedit » de la radio algérienne, co-animée par Sid Ali Naït Kaci et Belaïd Tagrawla qui étaient les premiers à contester activement la censure.

En 1970, il décroche un disque d'or avec la chanteuse Noura, faisant de lui l'un des meilleurs disques de l'hexagone. Il devient ainsi membre de la SACEM.

Dans les années 1970, il fait un duo avec Cheikh Norredine et chante en français ses célèbres chansons, « Algérie, mon beau pays » et « La carte résidence ».

Lors de l'enregistrement, Slimane Azem a conquis un large public communautaire avec ses textes allégoriques dans lesquels il met en scène des animaux et se pose en chanteur engagé.

Slimane Azem est décédé à Moissac, dans la région d'Occitanie, le 28 janvier 1983. Il reste, aujourd’hui encore, une des voix de l’exil et de la résistance des immigrés algériens.

Sa passion et son amour pour l’Algérie n'ont cessé de briller, et ses chansons ont été adoptées par tant d'artistes des deux côtés de la Méditerranée dpnt Matoub Lounès.

39 ans après son décès, ses chansons se lèguent de génération en génération et sa voix restera à jamais dans le cœur des amateurs de la chanson algérienne.