Quand les étoiles du stand-up s’éteignent !
En moins de vingt-quatre mois, la scène humoristique française a perdu plusieurs de ses figures les plus marquantes. De Wahid Bouzidi à Bun Hay Mean, des voix singulières se sont éteintes, laissant un vide dans le paysage du rire.
Publié : 15 juillet 2025 à 14h26 par La Rédaction
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L’humour français traverse une période sombre. En 2023 et 2025, quatre artistes aux univers très différents, mais tous immensément populaires, nous ont quittés. Leurs disparitions successives ont secoué le monde du spectacle, bouleversé le public et marqué d’une empreinte douloureuse les planches de la comédie.
Guillaume Bats, l’humour à fleur d’os
Guillaume Bats n’avait que 36 ans lorsqu’il est décédé, le 1er juin 2023. Atteint d’ostéogenèse imparfaite, plus connue sous le nom de « maladie des os de verre », il avait fait de sa condition une force. Révélé au grand public dans On n’demande qu’à en rire, il s’était rapidement imposé comme l’un des visages les plus singuliers de la nouvelle scène. Son humour noir, incisif, jamais complaisant, frappait fort. Avec son spectacle Inchallah, il désarmait par l’autodérision, osant rire de ce que beaucoup taisent.
Avec un talent rare pour rire de lui-même, Guillaume Bats avait fait de sa vulnérabilité une marque de fabrique. Son humour noir bousculait le public autant qu’il le séduisait, prouvant que le rire pouvait aussi naître de la douleur.
Wahid Bouzidi, la générosité du cœur
L’annonce de sa mort a frappé en plein cœur. Le 20 août 2023, un message sobre posté sur sa page Facebook bouleverse le monde du spectacle : « WAHID nous a quittés ce matin. Prions pour lui, sa famille et ses amis. » Un choc immense.
Originaire de Villepinte, en Seine-Saint-Denis, l’humoriste avait été hospitalisé en urgence à Marrakech après un AVC. Malgré les soins, il ne s’est jamais réveillé. Lui qui avait survécu à plusieurs attaques cérébrales précédentes n’a pas résisté à ce nouvel épisode.
Sa carrière débute véritablement en 2006, lorsqu’il rejoint la toute première équipe du Jamel Comedy Club. Il y côtoie Blanche Gardin, Fabrice Éboué, Thomas Ngijol. Wahid y impose un style singulier : un humour chaleureux, inspiré de ses épreuves et de sa corpulence assumée. Des titres comme Avant quand j’étais gros ou Graisse anatomie témoignent de cette capacité à transformer la douleur en rire.
En janvier 2023, il était remonté sur scène avec un nouveau spectacle, Wahid… il se relève. Un projet fort, où il racontait sa bataille contre la maladie. « Mon spectacle parle de moi après mes trois AVC, de la manière dont je me relève, comment j’ai pris les choses », confiait-il dans une vidéo pleine de courage.
Comédien accompli, il avait tourné dans une vingtaine de films : Neuilly sa mère, sa mère, Nicky Larson, Alad’2. À la télévision, sa présence lumineuse faisait mouche, notamment dans l’émission Vendredi tout est permis sur TF1.
Mais Wahid, c’était aussi une voix familière de Beur FM. Pendant trois ans, il animait la Matinale aux côtés de Kim. Une tranche pleine de rires, d’humanité, qui a marqué les auditeurs de la station. Un lien fort s’était tissé avec le public.
Sa disparition a laissé un vide immense. Booder, son ami, confiait peu après : « Je suis anéanti, triste, la vie m’a arraché une partie de moi. Mon frère, mon acolyte, mon ami, mon confident… est parti. » Un an plus tard, il partageait une photo d’eux sur Instagram, avec ces mots simples : « Un an déjà. Repose en paix. Tu me manques. »
Wahid Bouzidi n’est plus là, mais il continue de vivre dans les rires qu’il a semés, les souvenirs qu’il a laissés et les cœurs qu’il a touchés. Un géant doux, à jamais dans la mémoire collective
Michel Blanc, le spleen comique
Le 4 octobre 2024, c’est toute une génération qui a perdu un monument. Michel Blanc, acteur fétiche du Splendid, meurt à 72 ans des suites d’une réaction allergique survenue lors d’un banal examen médical. Son visage était indissociable de films cultes : Les Bronzés, Tenue de soirée, Monsieur Hire.
Mais il était aussi un réalisateur remarqué, avec des films comme Marche à l’ombre et Grosse Fatigue, et un acteur salué, notamment pour son rôle dans L’Exercice de l’État, qui lui a valu un César du meilleur second rôle.
Dans ses rôles, Michel Blanc maniait l’humour avec subtilité, jonglant entre comédie légère et profonde mélancolie. Une dualité qui faisait tout le charme de son jeu.
Il disait souvent que l’humour permettait de faire passer des vérités douloureuses avec légèreté — une philosophie partagée par beaucoup de comiques, même si cette formule exacte ne lui est pas directement attribuée.
Un art du contre-pied qui manque cruellement aujourd’hui.
Bun Hay Mean, le rire en rupture
Le dernier choc est encore frais. Le 10 juillet 2025, Bun Hay Mean meurt tragiquement à Paris, à 43 ans, après une chute accidentelle depuis son balcon.
D’origine sino-cambodgienne, il se faisait appeler « le Chinois Marrant » et revendiquait un humour politique et identitaire.
Avec lui, l’humour devenait une arme politique, un miroir tendu à la société française. Ancien du Jamel Comedy Club, il enchaînait les tournées et venait de terminer un rôle dans le film Astérix et Obélix : L’Empire du Milieu. Il préparait un nouveau spectacle, Kill Bun, qu’il devait jouer au Canada. Son humour corrosif et ses punchlines dérangeantes laissaient rarement indifférent. Il confiait un jour : « Quand tu fais rire avec la vérité, tu deviens dangereux. » Il l’était, et c’est ce qui le rendait si précieux.
Dans l’un de ses sketchs les plus mémorables, il évoquait son passage en Algérie avec un mélange d’ironie et de tendresse. Il racontait : « Aujourd’hui, il y a même des beaux bébés métisses, mi-Chinois, mi-Algériens. Super beau, hein, de l'extérieur... parce qu’à l’intérieur, c’est le bordel ! » Avec son style inimitable, il décrivait ses surprises culinaires, comme cette pizza aux quatre vaches qui rient, ou ce café algérien si fort qu’il « prenait tout le seum du monde pour le filtrer dans une tasse ». Mais derrière la moquerie, il rendait hommage à l’âme algérienne : « Je charrie les Algériens, mais je les kiffe de ouf. Trop de respect pour eux. Vous êtes des gilets jaunes qui ont réussi. » Et de conclure, dans un moment d’émotion rare : « Je pense qu’on a tous un Algérien en nous. Cette soif de liberté... de se lever face à ceux qui veulent nous écraser. »
Un hommage sincère, dans un sketch qui disait tout de son attachement aux cultures populaires et de sa capacité à faire rire sans jamais trahir son regard engagé.
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