L'Algérie retire son accréditation à la chaîne de TV internationale France 24

14 juin 2021 à 23h42 par Manuel Mariani

Le ministère de la Communication Algérien a annoncé hier, dimanche 14 juin, qu'il retirait son accréditation à la chaîne de télévision d'information française "France24", a-t-on appris auprès du ministre de la communication, par la voix du porte-parole du Gouvernement, le Professeur Ammar Belhimer.

BEUR FM
Crédit : © France 24

La même source a affirmé que ce retrait serait motivé par "l'hostilité manifeste et répétée contre notre pays et ses institutions, le non respect des règles de la déontologie professionnelle, la désinformation et la manipulation ainsi qu'une agressivité avérée à l'égard de l'Algérie", selon elle.

Le Ministère de la Communication avait déjà adressé un avertissement avant "retrait définitif" de l’accréditation de France, le 13 mars dernier, pour son prétendu "parti-pris flagrant" dans la couverture des marches en Algérie.

"Le parti-pris de France 24 dans la couverture des marches du vendredi est flagrant, allant jusqu’à recourir, sans retenue aucune, à des images d’archives pour les antidater afin de porter secours à résidu antinational constitué d’organisations réactionnaires ou séparatistes, aux ramifications internationales", avait alors affirmé le Ministère de la Communication Algérien, dans un communiqué.

Sur son site internet, France 24 indique que cette décision s'inscrivait "dans un contexte de raidissement des autorités algériennes à l'égard des médias indépendants, en particulier depuis les grandes manifestations populaires du printemps 2019 – le Hirak – qui réclamaient le démantèlement du régime", ajoutant que "L'annonce du retrait de l'accréditation de France 24 intervient au lendemain d'élections législatives anticipées, dont l'objectif avoué est de relégitimer le pouvoir en place se heurte à un fort taux d'abstention."

Cette décision survient au moment où les autorités algériennes continue de durcir le ton envers les médias indépendants, qu'ils soient Algériens ou internationaux. Cette mise au pas progressive des médias s'était accélérée depuis les grandes manifestations populaires du "Hirak" qui réclamaient le démantèlement du régime.

Le retrait de l'accréditation de la chaîne France 24 intervient dans la continuité des élections législatives anticipées sur lesquelles le Président Tebboune comptait s'appuyer pour tenter de légitimer son gouvernement. "Notre couverture de l’actualité algérienne se fait dans la transparence, l’indépendance et l’honnêteté. Comme c’est le cas partout dans le monde", a ajouté la chaîne dans un communiqué.

Selon l'ONG Reporters Sans Frontières, le paysage médiatique Algérien est actuellement "verrouillé par des lois liberticides", ajoutant que "deux ans après le début du Hirak, la situation politique en Algérie reste instable et la liberté d’informer est plus que jamais menacée. Profitant de la crise du coronavirus et de l'arrêt des manifestations populaires qui ont secoué le pays depuis février 2019, les autorités ont adopté des lois liberticides aux contours flous visant à verrouiller encore plus la liberté de l’information. Les poursuites judiciaires et les condamnations de journalistes pour des publications portant « atteinte à l’unité nationale » ou « atteinte à l'ordre public et à la sûreté de l'Etat » sont récurrentes. Plusieurs médias en ligne ont été bloqués et ne sont plus accessibles. Face aux pressions, les journalistes et les médias peinent à faire leur travail. Un durcissement visible de la répression envers toutes les voix dissidentes est à l'œuvre alors que les citoyens algériens ne cessent de revendiquer davantage de libertés."

L'Algérie figure à la 146e place sur 180 au Classement mondial de la liberté de la presse 2021 établi par Reporters Sans Frontières, soit un recul de 27 places depuis 2015.