Alger cloue le bec de la chaîne "El Hayat TV"

22 juin 2021 à 12h39 par Manuel Mariani

L'Autorité de régulation de l'audiovisuel (ARAV) a décidé, lundi, la suspension, à compter de mercredi prochain, pour la durée d'une semaine de tous les programmes de la chaîne "El Hayat TV" avec un avertissement suite à la diffusion vendredi dernier d'une émission lors de laquelle un ancien député aurait remis en cause "l'intégrité de certains moudjahidines."

BEUR FM
Crédit : D.R.

Dans un communiqué, l'ARAV indique avoir saisi le ministère de la Communication "aux fin de retrait de l'accréditation de la chaîne "El Hayat TV" pour la durée de la suspension de ses programmes" tout en affirmant "se réserver le droit d'engager toutes les mesures et procédures judiciaires adéquates en cas de récidive de tels dépassements et manquements professionnels".

"Après examen de tous les aspects du contenu de cette émission, l'ARAV a décidé la suspension de tous les programmes de la chaîne ‘El Hayat TV’ à compter du 23 juin 2021 à 00H00 jusqu'au 29 juin 2021 à 00H00 avec un avertissement et demande au ministère de la Communication de retrait de son accréditation pour la durée de la suspension de ses programmes", précise la même source.

"En date du 18 juin courant, ‘El Hayat TV’ a diffusé une émission où un ancien député s'arrogeant la qualité de chercheur en histoire et archives de la Révolution algérienne s'est permis de remettre en cause, par des déclarations irresponsables, la crédibilité et l'intégrité de nombre de moudjahidines allant, de manière très superficielle et tout à fait aléatoire loin de toute norme scientifique ou académique en matière d'histoire, jusqu'à porter atteinte à des symboles nationaux et des personnalités mythiques dans la mémoire collective, à savoir le fondateur de l'Etat algérien moderne, l'Emir Abdelkader, le militant de la première heure et revendicateur de l'Algérie indépendante, Messali Hadj, et l'ancien président de la République Houari Boumediene, l'un des symboles de la Guerre de libération et fondateur de l'Etat algérien post-indépendant, en s'attaquant, très subjectivement, à sa personne", relève l'ARAV soulignant "les vives réactions d'indignation et dénonciation suscitées par ce contenu au niveau national et international".

"Aucunement habilité à se prononcer sur des vérités historiques, l'invité de l'émission est tombé dans des erreurs et des contradictions nuisant à la mémoire de la Nation au moment où les Algériens s'apprêtent à célébrer le 59e anniversaire de l'indépendance nationale", estime l'ARAV qui exprime "son rejet de ce genre de discours consacrant la haine et la discrimination et portant atteinte aux principes généraux et à l’"éthique journalistique".

Affirmant pour autant respecter les avis des uns et des autres, l'ARAV a précisé "ne voir aucun inconvénient à la relecture de l'Histoire ou à l'ouverture d'un débat autour pour peu qu'une telle démarche émane de spécialistes et de chercheurs académiquement habilités."

Cette mesure intervient moins de 10 jours après le retrait de l'accréditation de la chaîne d'information internationale France 24 par les autorités algériennes et que par ailleurs, le directeur de l'Agence France-Presse (AFP) pour l'Algérie, Philippe Agret, n'a jamais obtenu d'accréditation des autorités depuis sa nomination en 2019, sans qu'aucun motif n'ait jamais été fourni.

L'Algérie figure à la 146e place sur 180 au Classement mondial de la liberté de la presse 2021 établi par Reporters Sans Frontières, soit un recul de 27 places depuis 2015.